Soigner les relations

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Dans toute relation il y a une part qui nous incombe et une part qui vient de l'autre, c'est la posture relationnelle adoptée. Chacun peut être soit dans une disposition à s'accorder avec l'autre ou à se mettre en concurrence. Ces deux postures antinomiques, respectivement  posture relationnelle d'apparentement et posture relationnelle de rivalité sont situées sur un continuum ce qui signifie qu'il y a des degrés et que l'on peut passer de l'une à l'autre.

Nous avons des habitudes relationnelles

Selon l'éducation que nous avons reçue et notre parcours de vie nous pouvons être familiarisé plus particulièrement avec l'une ou l'autre de ces deux postures relationnelles. Précisons leur différence majeure.

La posture relationnelle d'apparentement est une disposition à s'accorder avec les autres d'égal à égal, avec empathie et bienveillance au-delà des différences, d'âge, de sexe, de niveau d'études, d'origine, etc. Il s'agit d'une égalité symbolique en tant que personne, chacun apportant dans la relation ses compétences, ses qualités, ses points de vue tout en tenant compte de ce que l'autre apporte. Lorsque deux interlocuteurs sont dans l'apparentement les conditions sont réunies pour que la confiance s'installe ; si l'un est en difficulté, l'autre fait son possible pour l'aider ; la relation est détendue et efficace s'ils ont une tâche à effectuer ensemble.

La posture relationnelle de rivalité est une mise en concurrence avec les autres parce que la relation est vécue comme un rapport de comparaison, ce qui amène inconsciemment à hiérarchiser les personnes. La personne se croit supérieure ou inférieure à son interlocuteur sur la base d'un critère de comparaison. Tout est prétexte à hiérarchisation, une différence de capacité physique, intellectuelle, manuelle, artistique, tout autant qu'une différence portant sur un critère idéologique tel que la richesse, le pouvoir, la beauté, l'origine, l'orientation sexuelle, etc. Il y a concurrence pour occuper la place de supériorité parce que l'estime de soi en dépend. Si l'interlocuteur est en difficulté c'est une aubaine, on peut l'aider mais avec condescendance. La posture de rivalité se décline aussi avec un enjeu dominant/dominé, le sentiment de supériorité justifiant une prise d'ascendant sur autrui. Si deux personnes sont dans cette même posture, elles alternent entre les deux places car on ne peut pas gagner à tous les coups, sauf si l'une a été conditionnée à occuper la position d'infériorité-soumission.

Pourquoi peut-on passer d'une posture relationnelle à l'autre ?

Les deux postures relationnelles s'enracinent dans quelque chose de profond chez les humains. Nous avons tous un Ego qui nous pousse à l'égoïsme et à nous mettre en concurrence, et nous avons aussi quatre Exigences Fondamentales (4EF) de sens, justice, paix et amour qui lui font contrepoids et nous incitent à l'apparentement.

L'Ego est la partie de nous qui nous représente ; aux yeux des autres c'est par notre statut et notre apparence. Les 4EF appartiennent à notre Être, ce que nous sommes réellement. Nous avons un corps et des ressentis, des émotions, des pensées rationnelles et irrationnelles et nos 4EF. Tout cela est à l'intérieur de nous, mais si nous portons trop d'attention à notre apparence et au regard des autres, nous nous éloignons de notre Être et de nos 4EF. L'estime de soi devient alors dépendante du regard des autres et de leurs appréciations, ce qui créé un enjeu dans les relations. Alors que si nous portons notre attention prioritairement sur notre Être et nos 4EF notre valeur en tant que personne n'est pas mise en cause dans nos rapports avec les autres.

Soigner les relations

Soigner les relations signifie en premier lieu repérer sa propre posture relationnelle habituelle. Si c'est l'apparentement il importe d'apprendre à ne pas (ne plus) rester sans voix face à des personnes qui cherchent à prendre l'ascendant sur nous, d'apprendre à se faire respecter et à faire valoir nos éventuels désaccords posément. Ce n'est pas grave d'être en divergence, c'est même intrinsèquement lié à l'altérité. Chaque humain a reçu une éducation, vécu des expériences de vie, hérité d'une sensibilité, qui forment une sorte de prisme au travers duquel il voit la vie. Chaque prisme est unique donc des discordances sont inévitables, ce qui compte c'est de pouvoir les gérer de façon raisonnée et paisible. Nous donnons des conseils pour cela dans le chapitre suivant.

Une personne qui s'apercevrait en lisant ce texte qu'elle a été conditionnée à la rivalité est loin d'être seule dans ce cas car le monde dans lequel nous vivons favorise la mise en concurrence. C'est un monde qui hiérarchise les personnes sous des prétextes de richesse, de pouvoir et de notoriété, en fonction aussi des qualités ou des talents. Tout est susceptible de donner lieu à des concours et des classements. Dans ce monde où il faut se battre pour faire sa place ou pour la garder, des parents encouragent leurs enfants à se faire valoir, à s'affirmer (s'imposer) et à masquer leurs faiblesses pour éviter que les autres en profitent. Des coachs enseignent des techniques pour s'assurer la position de supériorité/domination, particulièrement dans le monde du travail. La posture de rivalité résulte donc d'un conditionnement, éducatif et/ou social.

Avec la posture de rivalité un désaccord devient vite un conflit, d'autant plus si les deux interlocuteurs sont dans cette posture. Le conflit finit par se solder avec un gagnant et un perdant, ce qui fait le lit d'un conflit ultérieur parce que le vaincu cherchera une revanche, fut-elle lointaine. Les affrontements rivaux peuvent potentiellement devenir violents, très violents, et même conduire à l'élimination d'une des deux personnes. Soigner les relations c'est apprendre à se déconditionner de la rivalité, ce sera le sujet d'un chapitre éponyme un peu plus loin.

Apprendre à se faire respecter et à faire valoir ses désaccords posément

Pour une personne étant dans l'apparentement, la première difficulté est de reconnaître l'éventuelle posture de rivalité de son interlocuteur car elle n'est pas visible au premier abord. Pour lui il y a un enjeu de place, souvent inconscient, qui le conduit à mettre l'autre en position d'infériorité ou de supériorité (s'il l'admire) et éventuellement de l'amener à dire ou faire quelque chose. C'est sa façon de s'adresser aux autres qui dévoile sa posture relationnelle. Il peut hausser le ton ou parler de façon péremptoire. Il peut utiliser des mots trop compliqués ou des arguments cinglants qui peuvent laisser l'autre sans voix. Il peut monopoliser la parole, la couper ou ignorer ce que l'autre dit. De façon plus subtile il peut jouer sur ses sentiments, le flatter, le menacer plus ou moins ouvertement, solliciter son empathie, etc. Il peut aussi lui donner des informations fausses ou partielles tout en lui demandant de prendre une décision sur-le-champ. En d'autres termes il l'intimide ou le manipule. Le plus déstabilisant est qu'il peut aussi dire une chose et son contraire. Il est dans l'immédiateté de la relation, ce qu'il a dit avant ne compte pas et si l'autre le lui rappelle il nie l'avoir dit ou l'accuse d'avoir mal compris.

Autre moyen de repérer une posture de rivalité, c'est de se mettre à l'écoute de son propre ressenti. Si vous éprouvez de la gêne, une difficulté à vous faire entendre, un sentiment de dévalorisation, une peur de dire certaines choses à votre interlocuteur par crainte de sa réaction, ce sont des signes qui indiquent sa posture de prise d'ascendant, au delà d'une amabilité apparente. Son éventuelle position d'infériorité est plus délicate à repérer, car elle vous fait ressentir des sentiments plutôt agréables de satisfaction et de fierté. Néanmoins il peut à tout moment changer de position et reprendre la position de supériorité-domination. En résumé, les ressentis face à une personne étant dans la rivalité sont beaucoup moins tranquilles que face à une personne étant dans l'apparentement.

Si vous avez repéré être face à un interlocuteur qui cherche à prendre l'ascendant sur vous, même subtilement, il importe d'apprendre à vous faire respecter et à faire valoir vos divergences posément. Nous avons identifié pour cela trois précautions à prendre :

- Différer toute prise de décision (chaque fois que c'est possible) : il s'agit de prendre du recul pour faire le point. Qu'avez-vous ressenti ? Avez-vous vraiment compris de quoi il retourne ? Où pouvez-vous prendre des renseignements complémentaires ? Ne soyez pas étonné qu'il prenne mal le fait de ne pas obtenir de réponse immédiate, c'est la confirmation qu'il est dans la posture de rivalité. S'il était dans l'apparentement cela ne le dérangerait pas.

- Ne pas vous appuyer sur ce qu'il dit : il peut dire une chose et son contraire d'un jour à l'autre, parfois même dans une même discussion. En fait il ne dit que ce qu'il pense devoir dire dans l'immédiateté de la relation pour arriver à ses fins. Finalement vous ne savez pas ce qu'il pense vraiment. Posez-vous systématiquement cette question : quel est son intérêt de me dire ça ? Même si vous n'avez pas la réponse, le fait de vous interroger sur ses intentions vous permet de ne pas prendre ses paroles pour argent comptant. Dans les grandes lignes, s'il vous dévalorise c'est qu'il a besoin de se rassurer lui-même de sa propre valeur, s'il vous flatte c'est qu'il cherche à obtenir quelque chose de vous.

- Ne pas lui livrer toutes vos pensées et vos ressentis : il fait feu de tout bois et utilise tout ce qu'il sait de vous contre vous. Mieux vaut donc vous en tenir aux faits et à votre exigence de respect, y compris en cas de désaccord.

Ces trois précautions ne sont pas naturelles pour une personne étant habituellement dans l'apparentement, c'est pourquoi elles nécessitent un peu d'entraînement avant de devenir automatiques. Pour compléter nous vous conseillons d'apprendre à lui répondre pour ne pas rester sans voix même face à son culot ou sa mauvaise foi ; il interprèterait votre silence comme un acquiescement.

Voici ci-dessous un tableau avec des idées de réponses pour chaque modalité de prise d'ascendant. L'idée générale est de donner à entendre à votre interlocuteur que vous portez un jugement négatif sur son attitude envers vous, pas sur sa personne. C'est pourquoi votre interpellation doit porter uniquement sur le processus qu'il utilise.

Comportements de rivalité (position supériorité) Idées de réponses
Hausser le ton « Est-ce qu'on peut parler calmement ? »
« Ce n'est pas parce que tu parles plus fort que je vais être d'accord. »
Ton autoritaire - Commander « ça peut se discuter quand même?! »
« En fait tu voudrais décider tout seul. »
Affirmations péremptoires « Je ne suis pas forcément d'accord. »
« c'est un peu vite dit »
Mots trop compliqués « Tu parlerais avec des mots plus simples on se comprendrait mieux. »
Arguments cinglants « C'est facile d'attaquer les autres au lieu de chercher à discuter. »
Dévaloriser subtilement l'autre « Tes sous-entendus sont déplaisants »
Monopoliser la parole Se boucher les oreilles + (dès qu'on peut parler) « En fait tu veux parler tout seul. »
Couper la parole Se boucher les oreilles + (dès qu'on peut parler) « j'aimerais bien pouvoir finir mes phrases. »
Ignorer ce que l'autre dit « Je t'ai déjà dit que [...]. »
« Je viens de te dire que [...]. »
Dire une chose et son contraire « Pourrais-tu m'envoyer un petit mail (sms) pour me le confirmer ? »
Flatter « C'est trop d'honneur, mais il faut que je réfléchisse. »
Demander une réponse immédiate « Je vais y réfléchir. »
« Tu as besoin d'une réponse pour quand au plus tard ? »
Se victimiser (pour obtenir quelque chose) « Tu as besoin d'une réponse pour quand au plus tard ? »
« De mon coté ça ne va pas être possible.» (sans se justifier)
Menacer « En fait tu me menaces faute d'arguments. »
« Mais ça c'est des menaces ! »
Présenter une argumentation pertinente mais sans ouverture pour la discussion. « J'ai besoin de temps pour y réfléchir. »
« Ce n'est pas si simple, je pense que tu oublies des choses »
« Il te faut une réponse pour quand au plus tard ? »
Faire preuve de mauvaise foi « Alors là, ça me laisse sans voix ! »
« Comment peux-tu dire ça ! »
Faire preuve de culot « ça va, tu n'es pas gêné(e) ? »
Quand votre interlocuteur n'écoute vraiment rien Partir + « On ne peut pas discuter avec toi.»

Ces réponses ne sont que des idées à s'approprier. Vous pouvez vous remémorer une situation avec une personne qui vous a mis en difficulté et repérer à l'aide du tableau le procédé qu'elle avait utilisé. Ensuite vous pouvez rejouer la scène mentalement en énonçant à haute voix votre réponse comme si vous étiez face à elle. Vous aurez rapidement d'autres mots qui viendront, les vôtres, ce qui facilitera votre prise de parole lorsqu'une autre situation se présentera. Il y a des chances pour que cette personne reprenne le même processus car chacun a des habitudes relationnelles, avec deux ou trois procédés favoris. Au début vous serez stressé de lui répondre d'autant plus qu'elle le prendra mal, ne vous en formalisez pas. Ancrez-vous dans vos 4EF et dites-vous que vous ne l'agressez pas, elle est simplement contrariée de ne pas obtenir ce qu'elle veut. Sachez que votre réaction la gênera dans ses velléités de domination. Les personnes qui prennent l'ascendant sur les autres veulent aussi qu'ils soient satisfaits ou fassent comme s'ils l'étaient. Au fil du temps vous subirez moins cette relation et vous permettrez éventuellement à cette personne  de changer de posture, à condition que sa rivalité ne soit pas trop ancrée.

Si votre interlocuteur se met en infériorité vis à vis de vous, vous laissant parler et vous confortant par principe dans ce que vous dites, voire vous admirant. Veillez simplement à ne pas tomber dans le piège de l'Ego. Même si ce que vous faites est admirable, cela ne fait pas de vous une personne admirable en bloc. Vous êtes comme tout un chacun, porteur de potentialités et de points faibles. L'humour peut vous aider à répondre à des compliments trop insistants « Holà ! c'est beaucoup trop d'honneur ! ». Vous pouvez aussi lui montrer ce qu'il apporte dans la relation, dans une éventuelle collaboration. Invitez-le à exprimer ses préférences, ses interrogations. Il fera ainsi l'expérience que son avis compte à vos yeux et ça restaurera son estime de soi en le décentrant de son Ego. Il expérimentera le plaisir d'être authentiquement lui-même dans la relation, d'être ancré dans son Être.

Se déconditionner de la rivalité

Pour se déconditionner de la rivalité il suffit de se recentrer sur les exigences fondamentales de sens, justice, paix et amour.  

Ces 4EF sont observables chez les jeunes enfants dès qu'ils commencent à parler. Ils posent des questions, souvent très pertinentes mais parfois mal reçues par les adultes. Un enfant qui se fait régulièrement rabrouer peut se renfermer sur lui-même et ne plus vouloir comprendre le monde qui l'entoure, il renonce à son exigence de sens. Les jeunes enfants sont aussi choqués par l'injustice, d'autant plus s'ils ont constaté que des adultes s'en accommodaient. Devenus adultes ils peuvent raconter des souvenirs d'injustices qui les ont marqués, quand bien même il n'en avaient été que témoins. Les enfants aspirent aussi à la paix. Un enfant qui vit dans un environnement tendu regrette que ses parents se disputent, il préfèrerait qu'ils s'entendent bien et qu'ils soient contents de lui, mais il n'a pas la main sur cela. Il peut alors se départir de son exigence de paix. Quant à l'exigence d'amour, à entendre au sens de l'amour d'autrui qui fonde l'empathie, elle est mise en acte par les très jeunes enfants qui peuvent tendre spontanément leur doudou à un enfant qui pleure. Il est rare qu'un enfant renonce à son exigence d'amour. S'il a renoncé aux trois premières (sens – justice – paix) c'est qu'il vit dans un environnement éducatif autoritaire et arbitraire, mais il aime malgré tout ses parents. Par amour pour eux et pour capter leur amour il peut se soumettre à leur mode éducatif. Il grandit alors avec l'idée qu'aimer l'autre c'est lui céder. Il est récompensé de son obéissance par des "tu es gentil" et quand il est sanctionné c'est sur le mode "tu es méchant". Il est touché dans sa personne par ces  jugements qui boostent son estime de soi ou la dégrade, ce qui fait le lit de sa posture relationnelle de rivalité. Alors qu'un enfant ayant des parents qui s'apparentent avec lui est complimenté ou sanctionné pour ce qu'il a dit ou fait pas pour qui il est. Il entend éventuellement un "ce que tu as fait est méchant", ce qui lui permet de reconnaître son erreur et la réparer. Il en ressort même grandi.

Si vous vous êtes éloigné de vos 4EF, n'en tenez pas rigueur à vos parents, ils ont subi eux-mêmes un conditionnement. Ils vous aiment mais sur le mode "qui aime bien châtie bien". De plus ils sont (vous êtes – nous sommes) sous l'influence d'un conditionnement social que nous avons déjà évoqué brièvement.

Il y a un discours dominant qui valorise la réussite pour la réussite, sans se préoccuper de savoir si elle est acquise au détriment d'autres personnes ou du bien commun. Un discours qui valorise aussi le conformisme, les "gentils citoyens" qui s'en remettent aux gouvernants et aux sachants pour organiser la vie sociale. En d'autres termes, ce discours dominant agit sur nous comme des jugements parentaux, faisant de nous "quelqu'un de bien" voire d'extraordinaire ou au contraire "un moins que rien".

Se reconnecter aux 4EF permet de se resituer soi-même de manière plus raisonnée, chacun ayant sa valeur propre, sa capacité de jugement, son désir de justice, de paix et d'amour. Si quelqu'un vous dit "tu es nul" il a tord, même s'il justifie son jugement par le fait que vous avez échoué à faire quelque chose. Les jugements qui collent une étiquette sur une personne sont toujours excessifs et souvent infondés. Pour vous déprendre d'un "tu es nul" et faire face à un échec éventuel votre exigence de sens est votre atout le plus précieux. En prenant le temps de réfléchir vous pouvez vous rendre compte que vous aviez simplement mis la barre trop haut, ou qu'on vous l'avait placée trop haut ce qui est fort différent. Ou alors que vous n'avez rien à vous reprocher mais que des événements imprévisibles ont empêché votre réussite. Ou encore que vous ne vous êtes pas investi vraiment dans cette action et vous pouvez aussi en comprendre la raison. Si vous vous étiez senti contraint de faire cette chose votre échec prend le sens d'une résistance passive. Recontextualiser l'échec permet d'y mettre un sens qui est plus juste. Faire cela pour soi-même permet de le faire pour les autres et  d'arrêter de les juger catégoriquement.

Sachez de plus que la dimension d'affrontement que génère la posture de rivalité est pourvoyeuse de jouissance. À bas bruit elle pousse à monopoliser la parole et à s'écouter parler pour en imposer à l'autre ou pour s'imposer. A l'extrême elle peut pousser au meurtre  voire à la torture. On entend parfois que la violence des rapports dominant/dominé serait naturelle et inévitable. Certes il peut y avoir des combats à mort chez les animaux sauvages, mais remarquons qu'ils ne s'acharnent jamais sur une victime et qu'ils n'attaquent pas dans le dos. Il suffit que l'un face acte de soumission pour que le combat s'arrête et que la tension redescende progressivement. Se déconditionner de la posture de rivalité implique d'accepter de lâcher prise au niveau de la jouissance de l'affrontement. C'est une petite blessure si vous y étiez accro, mais qui guérira vite car vous y gagnerez quelque chose qui n'a pas de prix, l'accès à la joie.

La joie  est impossible à ressentir au détriment de quelqu'un, donc impossible à ressentir dans le cadre d'une relation de rivalité (dans laquelle il y a toujours un dominé), impossible à ressentir quand notre réussite sociale se fait au détriment d'autres personnes. C'est l'émotion par excellence qui participe de ce qui nous rend heureux et elle est amplifiée lorsqu'elle est partagée. Elle est la plus-value du renoncement à la rivalité.


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